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Urbanisme, environnement : quelques arrêts du Conseil d'État du 25 octobre au 30 novembre 2021 le 01/12/2021

 

  • Arrêts mentionnés au recueil Lebon

La demande de permis de construire résultant de l’annulation du refus de ce permis ne remet pas en cause le principe de cristallisation des règles d’urbanisme applicables à la date du certificat d’urbanisme délivré. CE 24 nov. 2021, n°437375. Mentionné aux tables du recueil Lebon. L'article L. 410-1 du code de l’urbanisme a pour effet de garantir à la personne à laquelle a été délivré un certificat d’urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire déposée durant les dix-huit mois qui suivent examinée au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique.

Lorsqu'une demande est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d’urbanisme, dans les conditions précisées au point précédent, l'annulation du refus opposé à cette demande ne prive pas le demandeur du droit à voir sa demande examinée au regard des dispositions d’urbanisme en vigueur à la date de ce certificat, l'administration demeurant saisie de cette demande. Il en va ainsi alors même que le demandeur n'est susceptible de bénéficier d'un permis tacite qu'à la condition d'avoir confirmé sa demande.

Élaboration d’un PPRI : appréciation de la nature et de l’intensité du risque.  CE 24 nov. 2021, n°436071. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Pour l’élaboration d’un plan de prévention des risques d’inondation (PPRI – art. L. 562-1 et R. 562-3 du code de l’environnement) la nature et l'intensité du risque doivent être appréciés de manière concrète au regard notamment de la réalité et de l'effectivité des ouvrages de protection ainsi que des niveaux altimétriques des terrains en cause à la date à laquelle le plan est établi.

Il n'en va différemment que dans les cas particuliers où il est établi qu'un ouvrage n'offre pas les garanties d'une protection effective ou est voué à disparaître à brève échéance.

Par suite, l'autorité en charge de l'élaboration d'un PPRI ne peut légalement s'abstenir de tenir compte, lors de l'élaboration de ce document, de la modification de l'altimétrie de terrains résultant d'une opération de remblaiement au seul motif que celle-ci a eu lieu dans des conditions estimées irrégulières et présente, à ce seul titre, un caractère précaire dans l'attente d'une éventuelle régularisation, dont elle n'exclut pas la possibilité.

Permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale : faculté d’injonction du juge à l’égard de la CNAC. CE 22 nov. 2021, n°441118, 442107. Mentionné aux tables du recueil Lebon.

a) En vertu des articles L. 911-1 et L. 911-2 du CJA, le juge administratif peut, s'il annule la décision prise par l'autorité administrative sur une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale et en fonction des motifs qui fondent cette annulation, prononcer une injonction tant à l'égard de l'autorité administrative compétente pour se prononcer sur la demande de permis qu'à l'égard de la CNAC.

b) La circonstance qu'elle soit chargée par l'article R. 752-36 du code de commerce d'instruire les recours dont elle est saisie ne fait pas obstacle à ce que le juge administratif lui enjoigne, sur le fondement de l'article L. 911-1 du CJA, de prendre une mesure dans un sens déterminé si les motifs de la décision juridictionnelle l'impliquent nécessairement. Toutefois, l'annulation de la décision rejetant une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale sur le fondement d'un avis défavorable rendu par la CNAC n'implique, en principe, qu'un réexamen du projet par cette commission. Il n'en va autrement que lorsque les motifs de l'annulation impliquent nécessairement la délivrance d'un avis favorable.

Sursis à statuer en vue de la régularisation d’un permis de construire : office du juge. CE 9 nov. 2021, n°440028. Mentionné aux tables du recueil Lebon. A compter de la décision par laquelle le juge prononce un sursis à statuer en vue de la régularisation d’une autorisation d’urbanisme (art. L. 600-5-1 C. Urb.) :

- Si une mesure de régularisation a été notifiée au juge, seuls des moyens dirigés contre cette mesure de régularisation peuvent être invoqués devant ce dernier. Ainsi, les parties peuvent contester la légalité d'un permis de régularisation par des moyens propres et au motif qu'il ne permet pas de régulariser le permis initial.

- Si aucune mesure de régularisation n’est notifiée au juge, il appartient à celui-ci de prononcer l'annulation de l'autorisation de construire litigieuse, sans que puisse être contestée devant lui la légalité du refus opposé, le cas échéant, à la demande de régularisation présentée par le bénéficiaire de l'autorisation.

-  Une contestation du refus opposé à la demande de régularisation ne peut intervenir que dans le cadre d'une nouvelle instance, qui doit être regardée comme dirigée contre le refus d'autoriser le projet dans son ensemble, y compris les modifications qu'il était envisagé d'y apporter.

  • Arrêts inédits au recueil Lebon

Permis de construire : vice susceptible d’être régularisé, et procédure de contestation d’un permis de construire modificatif. CE 10 nov. 2021, n°439966. Erreur de droit de la cour d’appel qui a considéré qu’il n'y avait pas lieu de faire application des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l’urbanisme dès lors que le vice entachant le bien-fondé du permis de construire litigieux affectait la conception d'ensemble du bâtiment, déjà construit, et qu'il n'apparaissait pas susceptible de régularisation. Pour le Conseil d’État, la cour aurait dû rechercher s’il pouvait être régularisé, même si cela impliquait de revoir l'économie générale du projet en cause, et dans cette hypothèse, si les règles d’urbanisme en vigueur à la date à laquelle elle statuait permettaient une mesure de régularisation qui n'impliquait pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

Sur la contestation du permis de construire modificatif, le Conseil d’État rappelle les dispositions de l'article L. 600-5-2 du code de l’urbanisme, applicables le 1er janvier 2019 (et donc à l’espèce), selon lesquelles la légalité d'un permis modificatif, d'une décision modificative intervenue au cours d'une instance dirigée contre le permis de construire initialement délivré ne peut être contestée par les parties que dans le cadre de cette même instance, dès lors que cette mesure leur a été communiquée, qu'elle fasse suite à une décision juridictionnelle ou qu'elle ait été prise spontanément par son auteur en cours d'instance.

Conditions de l’appréciation du classement d’une parcelle en zone A du PLU. CE 24 nov. 2021, n°435178.  (articles R. 151-22 et 23 du code de l’urbanisme, L.525-1 du code rural et de la pêche maritime,).  Si, pour apprécier la légalité du classement d'une parcelle en zone A, le juge n'a pas à vérifier que la parcelle en cause présente, par elle-même, le caractère d'une terre agricole et peut se fonder sur la vocation du secteur auquel cette parcelle peut être rattachée, en tenant compte du parti urbanistique retenu ainsi que, le cas échéant, de la nature et de l'ampleur des aménagements ou constructions qu'elle supporte, ce classement doit cependant être justifié par la préservation du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles de la collectivité concernée, à plus forte raison lorsque les parcelles en cause comportent des habitations voire présentent un caractère urbanisé. 

Appréciation de la notion d’extension « en vue de conserver l’unité architecturale ». CE, 19 nov. 2021, n° 445509. Permis modificatif permettant de prolonger sur environ 1,20 m, avec le même bardage en bois, la couverture du mur de façade du premier étage d’une grange jusqu'au mur mitoyen de l'habitation voisine... ces travaux de clôture du mur s'inscrivant dans le volume préexistant du bâtiment.  

Carte communale : caractérisation d’une incohérence – office du juge. CE 19 nov. 2021, n°442688. Il résulte des dispositions des articles L. 161-1 et R. 161-4 du code de l’urbanisme que pour apprécier la cohérence au sein de la carte communale, entre le rapport de présentation et le ou les documents graphiques, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d’urbanisme si le ou les documents graphiques ne contrarient pas les objectifs que les auteurs du document ont définis dans le rapport de présentation, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'un document graphique à un objectif du rapport de présentation ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres objectifs énoncés au sein de ce rapport, à caractériser une incohérence entre le document et ce rapport.

Opposabilité des Directives Territoriales d’Aménagement. CE 19 nov. 2021, n°435153. Si les auteurs des plans locaux d’urbanisme  doivent s'assurer que les partis d’urbanisme présidant à l'élaboration des documents d’urbanisme mentionnés au 1° de l'article L. 172-2 (dans sa rédaction alors en vigueur) sont compatibles, lorsqu'elles existent, avec les directives territoriales d'aménagement, seules les dispositions de ces directives qui ont pour objet de préciser les modalités d'application des dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne sont opposables aux demandes d'autorisation d’urbanisme portant sur des projets situés dans des territoires couverts par ces directives, sous réserve que ces prescriptions soient suffisamment précises et compatibles avec ces dispositions. Exemple de la directive territoriale d’aménagement des Alpes-Maritimes et de ses dispositions sur l’extension de l’urbanisation dans les espaces urbanisés sensibles. Notion de reconstruction au sens de la Directive.

Réparation du préjudice découlant d’un refus illégal d’une autorisation de lotir : appréciation du caractère certain et direct du préjudice. CE 18 nov. 2021, n°437821. Exception faite de l’hypothèse où l’autorité administrative aurait pu rejeter légalement la demande d’autorisation sans méconnaitre l’autorité absolue de la chose jugée s’attachant au jugement d’annulation, la perte de bénéfices ou le manque à gagner découlant de l'impossibilité de réaliser une opération immobilière en raison du refus illégal opposé à la demande de lotissement revêt un caractère éventuel et ne peut, dès lors, en principe, ouvrir droit à réparation.

Il en va, toutefois, autrement si le requérant justifie de circonstances particulières, telles que des engagements souscrits par de futurs acquéreurs des lots ou l'état avancé des négociations commerciales avec ces derniers, permettant de faire regarder ce préjudice comme présentant, en l'espèce, un caractère direct et certain. Ce dernier est alors fondé, si tel est le cas, à obtenir réparation au titre du bénéfice qu'il pouvait raisonnablement attendre de cette opération.

Taxe locale d’équipement : précisions du Conseil d’État. CE 15 nov. 2021, n°431323. L’assiette de la taxe locale d'équipement applicable aux locaux d'un immeuble collectif et à ses annexes doit être déterminée en appliquant à la surface moyenne des logements composant l'immeuble les tranches du barème définies respectivement aux a et b du 5° et au 7° du I de l'article 1585 D du code général des impôts, puis en multipliant le résultat obtenu par le nombre de logements. Erreur de droit du tribunal ayant jugé que les valeurs forfaitaires applicables en application de ces dispositions devaient être déterminées en fonction de la surface de chacun des logements pris individuellement.

Taxe locale d'équipement et la taxe des espaces naturels sensibles :

Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération.

Annulation d’une autorisation d’urbanisme obtenue par fraude : éléments à prendre en compte pour caractériser la fraude. CE 18 nov. 2021, n°442887. Il incombe au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen tendant à l'annulation de la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé de faire usage de son pouvoir d'abroger ou de retirer un acte administratif obtenu par fraude, d'une part, de vérifier la réalité de la fraude alléguée et, d'autre part, de contrôler que l'appréciation de l'administration sur l'opportunité de procéder ou non à l'abrogation ou au retrait n'est pas entachée d'erreur manifeste, compte tenu notamment de la gravité de la fraude et des atteintes aux divers intérêts publics ou privés en présence susceptibles de résulter soit du maintien de l'acte litigieux soit de son abrogation ou de son retrait. 

Erreur de droit de la cour qui, en se bornant, pour caractériser l'élément intentionnel de la fraude, à relever que le bénéficiaire de la décision ne justifiait pas de la date de construction du bâtiment objet de sa déclaration de travaux et n'établissait dès lors pas que ce dernier n'entrait pas dans le champ de l'obligation de permis de construire.

Conditions de rejet par ordonnance pour irrecevabilité. CE 9 nov. 2021, n°447271.Les dispositions des articles R. 612-1 et R. 222-1 du code justice administrative n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre un rejet par ordonnance lorsque la juridiction s'est bornée à communiquer au requérant, en lui indiquant le délai dans lequel il lui serait loisible de répondre, le mémoire dans lequel une partie adverse a opposé une fin de non-recevoir. En pareil cas, à moins que son auteur n'ait été invité à la régulariser dans les conditions prévues à l'article R. 612-1 du code de justice administrative, la requête ne peut être rejetée pour irrecevabilité que par une décision prise après audience publique. 

Contentieux des antennes-relais : application de la loi Elan. CE 9 nov. 2021, n°441203. À l’occasion d’une demande de suspension, le Conseil d’État juge de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que en retirant la décision de non-opposition de l’implantation d’une antenne, le maire a méconnu les dispositions de l'article 222 de la loi du 23 novembre 2018 dite " loi Elan ", aux termes desquelles " (...) jusqu'au 31 décembre 2022, les décisions d’urbanisme autorisant ou ne s'opposant pas à l'implantation d'antennes de radiotéléphonie mobile avec leurs systèmes d'accroche et leurs locaux et installations techniques ne peuvent pas être retirées ".

Référé suspension d’un permis de construire : appréciation du juge sur l’urgence. CE 4 nov. 2021, n°446209. Erreur de droit du juge qui s’est fondé, pour juger que l’urgence ne justifiait pas la suspension de la décision de retrait d’un permis de construire (ainsi que de la décision refusant le transfert de ce permis) sur la seule éventualité d'une nouvelle prolongation de la promesse de vente pour l’achat du terrain d’assiette du projet de construction, non invoquée devant lui.  Il était en effet soutenu, ainsi que cela ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis, que la promesse de vente avait été consentie sous la condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire " purgé de tout recours et de tout retrait ", au plus tard, après avenant, le 5 février 2021 et qu'en cas de retrait du permis, la condition suspensive serait réputée comme n'étant pas réalisée et la promesse comme caduque.

Classement d’une parcelle en zone inconstructible lorsqu’un permis d’aménager a été délivré. CE 29 oct. 2021, n°427831. Le Conseil d’État confirme le dispositif de la Cour d’appel ayant jugé que ni les dispositions de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme (rédaction applicable à l’espèce) sur la cristallisation des règles d’urbanisme dans un délai de cinq ans suivant l’achèvement des travaux lorsque le lotissement a fait l’objet d’un permis d’aménager, ni aucune autre règle ou principe ne font pas obstacle à ce que le PLU classe en zone inconstructible des parcelles sur lesquelles un permis d’aménager a été délivré.

Refus illégal de permis de construire engageant la responsabilité de la commune : office du juge dans l’appréciation du lien direct du préjudice. CE 20 oct. 2021, n°438109. Pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour administrative de Nancy ayant annulé le jugement du tribunal administratif de Strasbourg ayant condamné la commune à verser une somme en réparation du préjudice résultant d’un refus de permis de construire illégal. Erreur de droit de la cour qui a estimé que le préjudice subi n’avait pas pour cause directe cette décision mais un second refus de permis de construire. Pour le Conseil d’État, la cour aurait dû rechercher si, eu égard à la nature du préjudice invoqué (frais de constitution du dossier de permis de construire) et à la circonstance que le requérant soutenait avoir perdu la maîtrise foncière du terrain d’assiette et ne pouvait plus mener à bien son projet, l’existence d’une seconde décision de refus et son caractère définitif pouvaient être utilement opposés au requérant.

Intérêt pour agir des associations (art. L. 600-1-1 du code de l’urbanisme. CE 20 oct. 2021, n°442424. Après avoir relevé que le statut de l'association requérante définissait précisément son objet matériel, distinct de celui de ses membres, ainsi que son champ d'action géographique, et qu'il avait été adopté très antérieurement à la présentation du recours, la cour administrative d'appel a pu sans commettre d'erreur de droit se fonder sur l'objet social de l'association pour apprécier son intérêt pour agir contre le permis de construire litigieux.

Référé suspension d’un permis de construire : appréciation de la condition d’urgence et point de départ du délai de cristallisation CE 20 oct. 2021, n°445731. Confirmation d’une jurisprudence récente rappelant que l’appréciation de la condition d’urgence doit être globale au vu des circonstances soumises au juge et précisant le départ du délai de cristallisation. Ce délai (art. R. 600-5 C. urb.) est de deux mois à compter de la communication du premier mémoire en défense de l’un des codéfendeurs.

Le permis de construire et le permis de démolir objet d’un même arrêté restent deux actes distincts. CE 18 oct. 2021, n°449506. Erreur de droit du tribunal administratif de Grenoble ayant annulé en son entier l’arrêté par lequel le maire a délivré un permis de démolir et un permis de construire un immeuble de 22 logements pour des motifs tirés de la seule illégalité du permis de construire. Il résulte des dispositions des articles L. 421-6 et R. 431-21 du code de l’urbanisme que si le permis de construire et le permis de démolir peuvent être accordés par une même décision, au terme d'une instruction commune, ils constituent des actes distincts comportant des effets propres.