La Revue de l'arbitrage publie une note de Jérôme Barbet au sujet de l'arrrêt Clemessy rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 24 juin 2020 (Rev. arb. 2021, p. 164).
La clause prévoyant qu’une partie « peut » soumettre un différend à l’arbitrage après avoir épuisé un préalable de conciliation constitue-t-elle une clause compromissoire ou une clause optionnelle ne prévoyant qu’une faculté pour les parties, et non une obligation, de recourir à l’arbitrage ? Au demeurant, doit-on considérer qu’une clause optionnelle bilatérale de résolution des litiges n’oblige pas les parties à se soumettre à l’arbitrage en cas de différend ? Le principe compétence-compétence est-il applicable en présence d’une clause optionnelle ? La clause d’arbitrage est-elle manifestement inapplicable lorsque le juge étatique est saisi de demandes formées par un tiers à l’encontre d’une partie à un contrat contenant une clause d’arbitrage, ayant pour fondement des manquements du cocontractant à ses obligations contractuelles ? Telles étaient les questions dont la Cour de cassation était saisie dans cette affaire.
In fine, la Cour de cassation a refusé toute confusion entre clause optionnelle et clause compromissoire précédée d’un préalable de conciliation et appliqué le principe compétence-compétence à la demande d’un tiers invoquant un manquement contractuel.
Avant cette affaire, la Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de juger qu’une clause du même type, stipulant que les litiges devaient être réglés à l'amiable, et que, si cela était impossible, « chacun des contractants pourra appeler un tribunal arbitral qui résoudra le litige (...) de manière définitive et obligatoire pour les deux contractants » devait être considérée comme signifiant, « non que chaque partie dispose d'une option entre les juridictions arbitrale et étatique, mais que chacune d'elles a le pouvoir de mettre en œuvre l'arbitrage convenu, de sorte que la faculté d'y recourir exercée par l'une s'impose à l'autre ».[1]
[1] Sur la tendance du juge judiciaire à faire du « zèle » et affirmer que la convention d’arbitrage est applicable, au lieu de se contenter de constater que la clause n’est pas « manifestement inapplicable » et de renvoyer à l’arbitre le soin de dire si elle doit s’appliquer ou non, v. par exemple Cass., Civ. 1ère, 19 décembre 2018, n°17-28.951, Dalloz Actualité, 28 février 2019, obs. V. Chantebout ; Dalloz Actualité, 6 mars 2019, obs. J. Jourdan-Marques ; Dr. mar. Fr., 2019, n°810, p. 114, obs. Ph. Delebecque ; Rev. gen. dr. ass., 2019, n°2, p. 39, note R. Schulz ; Gaz. Pal., 2019, n°11, p. 34, obs. D. Bensaude. qui tout en renvoyant les parties à mieux se pourvoir devant l’arbitre, a jugé que la clause compromissoire « accessoire du droit d’action » est « opposable aux victimes exerçant l’action directe contre les assureurs ». V. également, interprétant la clause compromissoire : Paris, Pôle 5, Ch. 9, 25 février 2016, Rev. arb., 2017.622, obs. J. Barbet. V. aussi, Cass., civ. 1ère, 15 oct. 1996, Rev. arb., 1998.409, note C. Malinvaud et L. Kiffer.
[2] V. J. Jourdan-Marques, « Action extracontractuelle et arbitrage », Rev. arb., 2019.685.