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Inopposabilité des règles empêchant l'utilisation de matériaux énergétiquement performants, enregistrement des transactions, annulation partielle du décret clause-filet...quelques actualités jurisprudentielles en urbanisme et environnement depuis septembre le 24/10/2023

L’hébergement de personnes en provenance d’Ukraine peut être regardé comme une action ou une opération d’aménagement. CE, 13 oct. 202, n°468694. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Pour l’application des articles L. 210-1 et L. 300-1 du code de l’urbanisme, l’hébergement de personnes déplacées en provenance d’Ukraine et bénéficiaires de la protection temporaire instituée, compte tenu du constat d’afflux massif de ces personnes opéré par la décision d’exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 peut être regardé comme s’inscrivant dans une politique locale de l’habitat et comme constituant une action ou une opération d’aménagement au sens de ce dernier article.

Le Conseil d’État rejette le recours formé contre l’ordonnance du 6 avril 2022 relative au recul du trait de côte. CE 13 oct. 2023, n°464202. Aucun des griefs invoqués par l’AMF et l’Anel (Association nationale des élus des littoraux) n’a été retenu. Cette ordonnance est prise en application de l’article 248 de la loi Climat et résilience qui a pour but de rendre possible la relocalisation progressive de l’habitat et des activités affectées par l’érosion côtière.

Inopposabilité des règles empêchant l'utilisation de matériaux ou procédés favorables aux performances environnementales et énergétiques (art. L. 111-6). CE 4 oct. 2023, n°467962. Mentionné aux tables du recueil Lebon. L'article L. 111-16 du code de l'urbanisme n'a ni pour objet, ni pour effet d'écarter l'application des dispositions réglementaires d'un plan local d'urbanisme (PLU) relatives à l'aspect extérieur des constructions qui, sans interdire l'utilisation de matériaux ou procédés permettant d'éviter l'émission de gaz à effet de serre ou l'installation de dispositifs destinés à la production d'énergie renouvelable ou favorisant la retenue des eaux pluviales, imposent la bonne intégration des projets dans le bâti existant et le milieu environnant. Par suite, l'article d'un PLU qui n'interdit pas la pose de panneaux solaires sur les toitures mais exige que leur insertion soit cohérente avec l'architecture de la construction sur laquelle ils sont installés n'est pas inopposable à une demande d'installation de panneaux solaires thermiques.

Procédure contentieuse : rejet pour irrecevabilité d’un pourvoi incident dirigé contre les motifs d’une ordonnance … faisant droit à la demande de suspension d’un permis de construire. CE, 6 oct. 2023, n°471190. Mentionné recueil Lebon. Riverains ayant obtenu la suspension d’un arrêté délivrant un permis de construire. Requérants ayant ensuite formé un pourvoi incident contre cette ordonnance, en tant que le juge des référés a, sur le fondement de l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme, jugé que certains des moyens qu’ils invoquaient ne sont pas, en l’état de l’instruction, propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de cet arrêté. Le pourvoi incident étant dirigé contre les seuls motifs de l’ordonnance attaquée et non contre son dispositif, qui ne leur fait pas grief dès lors qu’il fait droit à leur demande de suspension de l’exécution du permis de construire , ne peut qu’être rejeté comme irrecevable.

Annulation partielle du décret clause-filet. CE 4 oct. 2023, n°465921 et n°467653. Annulation de l’article 8 du décret du 25 mars 2022 relatif à l’évaluation environnementale des projets, « en tant qu’il ne prévoit pas d’exception aux dispositions de l’article R. 424-1 du Code de l’urbanisme dans l’hypothèse où une déclaration préalable a fait l’objet d’une évaluation environnementale à la suite de la mise en œuvre de la clause-filet ». Cet article prévoit que le silence gardé par l’autorité compétente au terme du délai d’instruction sur une déclaration préalable vaut décision tacite de non-opposition. Pour le Conseil d’État, faute de prévoir une exception à ces dispositions, dans l’hypothèse où le dispositif filet est activé et qu’une évaluation environnementale doit être menée, « le pouvoir réglementaire a méconnu les dispositions [législatives précitées] ».

ZAN : annulation partielle du décret du 29 avril 2022. CE, 4 oct. 2023, n°465341. L’annulation concerne l’alinéa 2 de l’article R. 101-1, II du Code de l’urbanisme, issu du décret n°2022-763 relatif à la nomenclature de l’artificialisation des sols. Le Conseil d’État a estimé que le terme « polygones » utilisé pour la définition des zones artificialisées, à lui seul, n’était pas assez précis.

Opposition à un projet de parc éolien sur les terres de Marcel Proust. CE 6 oct. 2023, n°473422. Pour le Conseil d’État, le projet risquait de « porter une atteinte significative à des paysages étroitement liés à la vie et l'œuvre de l'écrivain". Les magistrats de la cour administrative de Versailles avaient retenu que "les éoliennes projetées seraient visibles depuis certains lieux se situant au sein du périmètre du site patrimonial remarquable d'Illiers-Combray ou à sa périphérie" et « relevé que le clocher de l'église d'Illiers-Combray et le jardin du Pré Catelan, dessiné par Jules Amiot, oncle de Marcel Proust, sont classés au titre des monuments historiques". Le Conseil d'État confirme la décision de la cour qui a pris "en considération des éléments qui ont trait aux dimensions historiques, mémorielles, culturelles et notamment littéraires du paysage" afin de s'opposer au projet de parc éolien.

Annulation d’une dérogation espèces protégées. CAA Nancy, 28 sept.  2023, n° 20NC03693. La dérogation avait été accordée pour la construction de logements sociaux. La dérogation (deux arrêtés) autorisait les pétitionnaires à déroger à l'interdiction de capture temporaire avec relâché et de destruction des spécimens de salamandres tachetées. Attaqués par une association et 60 riverains, les arrêtés ont d’abord été annulés par le tribunal administratif de Nancy. Pour la CAA le projet ne répond pas à une raison impérative d'intérêt public majeur suffisante pour justifier" une dérogation. En effet, « (…) même si ce projet présente un intérêt public, il ne répond toutefois pas à une raison impérative d'intérêt public majeur suffisante pour justifier, en l'espèce, qu'il soit dérogé à la législation assurant l'objectif de conservation de la faune sauvage ».

Démolition d’un ouvrage public irrégulièrement implanté : le juge doit tenir compte de « l’écoulement du temps » et du bilan coût avantage de la démolition. CE 27 sept. 2023, n°466321. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Lorsqu’il est saisi d'une demande tendant à ce que soit ordonnée la démolition d’un ouvrage public dont il est allégué qu’il est irrégulièrement implanté par un requérant qui estime subir un préjudice du fait de l’implantation de cet ouvrage et qui en a demandé sans succès la démolition à l’administration, il appartient au juge administratif, juge de plein contentieux, de déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si l’ouvrage est irrégulièrement implanté, puis, si tel est le cas, de rechercher, d'abord, si eu égard notamment à la nature de l’irrégularité, une régularisation appropriée est possible, puis, dans la négative, en tenant compte de l’écoulement du temps, de prendre en considération, d'une part les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence, notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part, les conséquences de la démolition pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.

Effets d’une ordonnance de rejet d’une 2e demande de suspension sur la 1ère. CE 22 sept. 2023, n°472210. Publié au recueil Lebon. La circonstance que le juge des référés a rejeté une première demande de suspension présentée sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative (CJA) ne fait pas obstacle à ce que le même requérant saisisse ce juge d’une nouvelle demande ayant le même objet, notamment en soulevant des moyens ou en faisant valoir des éléments nouveaux, alors même qu’ils auraient pu lui être soumis dès sa première saisine.

Dans le cas où le demandeur, après le rejet d’une demande de suspension présentée sur le fondement de l’article L. 521-1 du CJA, fait usage de cette faculté en saisissant à nouveau le juge des référés de conclusions ayant le même objet et se pourvoit également en cassation contre la première ordonnance ayant rejeté sa demande, l’intervention, postérieurement à l’introduction de ce pourvoi, d’une nouvelle ordonnance rejetant la nouvelle demande rend, eu égard à la nature de la procédure de référé, sans objet les conclusions dirigées contre la première ordonnance, alors même que la seconde n’est pas devenue définitive.

L’autorité de la chose jugée en matière d’annulation de permis de construire. CE 21 sept. 2023, n°467076. Publié au recueil Lebon. L'autorité de chose jugée s'attachant au dispositif d'un jugement, devenu définitif, annulant un permis de construire ainsi qu'aux motifs qui en sont le support nécessaire fait obstacle à ce que, en l'absence de modification de la situation de droit ou de fait, le refus opposé antérieurement ou ultérieurement par l'autorité administrative à la demande d'un permis ayant le même objet soit annulé par le juge administratif dès lors que ce refus est fondé sur le même motif que celui ayant justifié l'annulation du permis de construire. Alors même que la légalité d'un refus de permis s'apprécie à la date à laquelle il a été pris, il appartient ainsi au juge de l'excès de pouvoir de prendre acte de l'autorité de la chose jugée s'attachant, d'une part, à l'annulation juridictionnelle devenue définitive du permis de construire ayant le même objet, délivré postérieurement à la décision de refus, et, d'autre part, au motif qui est le support nécessaire de cette annulation.

Enregistrement des transactions : la sanction prévue est conforme à la Constitution. Cons. const., 14 sept. 2023, n° 2023-1060 QPC. Le Conseil constitutionnel a jugé conformes à la Constitution les dispositions de l’article L. 600-8 du Code de l'urbanisme relatives à la sanction prévue en cas de méconnaissance de l’obligation d’enregistrement des transactions mettant fin à une instance relative à une autorisation d’urbanisme. En cas de méconnaissance de cette obligation, la contrepartie qui a été consentie au requérant est réputée sans cause et sujette à une action en répétition, alors que le titulaire de l’autorisation d’urbanisme qui faisait l’objet du recours conserve le bénéfice du désistement.