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Urbanisme, environnement : quelques décisions intéressantes (de décembre à mi-février) le 23/02/2024

Des omissions ou inexactitudes d’un arrêté de permis de construire sans effet sur la portée ou la légalité de ce permis. CE, 20 déc. 2023, n°461552. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Un permis de construire, sous réserve des prescriptions dont il peut être assorti, n'a pour effet que d'autoriser une construction conforme aux plans déposés et aux caractéristiques indiquées dans le dossier de demande de permis. D'éventuelles erreurs susceptibles d'affecter les mentions devant figurer sur l'arrêté délivrant le permis (C. Urb. A. 424-9) ne sauraient donner aucun droit à construire dans des conditions différentes de celles résultant de la demande. Par suite, la seule circonstance que l'arrêté délivrant un permis de construire comporte des inexactitudes ou des omissions en ce qui concerne la ou les destinations de la construction qu'il autorise, ou la surface de plancher créée, est sans incidence sur la portée et sur la légalité du permis.

Règles opposables aux projets éoliens : cas des règles de hauteur. CE 18 déc. 2023, n°459339. Mentionné aux tables du recueil Lebon.

1)    Depuis le 1er mars 2017, les projets d’installations d’éoliennes sont soumis à autorisation environnementale. Ils doivent être conformes à l’ensemble des prescriptions du plan local d’urbanisme, notamment aux règles relatives à la hauteur des constructions et installations. (articles L. 421-5 et L. 421-8 du code de l'urbanisme, art. R. 425-29-2 al. 1du même code et art. D. 181-15-2 du code de l'environnement).

2)    Pour les projets qui ont fait l'objet d'une demande régulièrement déposée avant le 1er mars 2017 et qui sont soumis à la fois à l'exigence d'un permis de construire et d'une autorisation d'exploiter ICPE, seules les prescriptions du PLU qui déterminent les conditions d'utilisation et d'occupation des sols et les natures d'activités interdites ou limitées s'imposent à cette autorisation. Les règles relatives à la hauteur des constructions et installations, dont le respect est assuré, à l'occasion de la délivrance du permis de construire, ne sont pas opposables à l'autorisation d'exploiter, peu important à cet égard la circonstance qu'elles figurent dans une partie du règlement du PLU relative à la nature de l'occupation et de l'utilisation des sols.(articles L. 151-9, L. 421-1, L. 421-6 et R. 151-33 , L. 123 5, devenu L. 152-1du code de l'urbanisme,  L. 514-6 du code de l'environnement).

La mise en œuvre du droit de préemption commercial doit répondre à un intérêt général suffisant. CE, 15 déc. 2023, n° 470167. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Selon l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, les collectivités titulaires du droit de préemption des communes sur les fonds artisanaux, fonds de commerce, baux commerciaux et terrains faisant l’objet d’un projet d’aménagement commercial (articles L. 214-1 et L. 214-2) peuvent légalement exercer ce droit :

1) si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300 1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date,

2) si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.

3) En outre, la mise en œuvre de ce droit doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien, en l'occurrence le fonds artisanal ou commercial ou le bail commercial, faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre à un intérêt général suffisant.

Mise en demeure de régulariser une construction impliquant une démolition : présomption d’urgence pour le propriétaire présentant une demande de suspension, sauf circonstances particulières.  CE, 11 Déc. 2023, n° 470207. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Eu égard à la gravité des conséquences qu’emporte une mise en demeure, prononcée en application de l’article L. 481-1 du code de l’urbanisme, lorsqu’elle prescrit une mise en conformité qui implique nécessairement la démolition de constructions, la condition d'urgence est en principe satisfaite en cas de demande de suspension de son exécution par le propriétaire de l'immeuble qui en est l'objet. Il ne peut en aller autrement que dans le cas où l’autorité administrative justifie de circonstances particulières faisant apparaître, soit que l’exécution de la mesure de démolition n’affecterait pas gravement la situation du propriétaire, soit qu’un intérêt public s’attache à l’exécution rapide de cette mesure.

Sursis à statuer en vue de régulariser un arrêté DUP : l’appréciation de l’utilité publique peut attendre. CE 11 déc. 2023, n°466593. Mentionné aux tables du recueil Lebon. La faculté de régularisation d’un arrêté déclarant d’utilité publique des travaux et approuvant la mise en compatibilité de plans d’occupation des sols (POS) et de plans locaux d’urbanisme (PLU) peut être mise en œuvre pour la première fois en appel.

Le juge administratif peut, dans le cadre d’une première décision par laquelle il sursoit à statuer afin de permettre la régularisation de l’illégalité entachant un arrêté déclarant d’utilité publique des travaux, réserver pour la seconde décision l’appréciation de l’utilité publique.

Requérant ayant demandé l’annulation d’un arrêté déclarant d’utilité publique des travaux. Cour ayant constaté l’existence d’un vice tiré des insuffisances de l’étude d’impact du projet puis sursis à statuer en vue de permettre la régularisation de ce vice. Cour ayant estimé que les lacunes de l’étude d’impact ne lui permettaient pas d’apprécier l’utilité publique du projet et que la réponse au moyen contestant cette utilité publique supposait de disposer des éléments complémentaires attendus de l’éventuelle régularisation.

Conditions d’ouverture à l’urbanisation des secteurs à caractère naturel (classement en zone AU). CE 6 déc. 2023, n°466055. Mentionné aux tables du recueil Lebon

1) Seuls les voies et réseaux existants à la périphérie immédiate, et non les travaux projetés, peuvent être pris en compte pour classer une zone comme ouverte à l'urbanisation sur le fondement de l’article R. 123-6 du Code de l’urbanisme.

2) Au cas contraire, en application du troisième alinéa du même article, le plan local d'urbanisme (PLU) peut soit subordonner l'ouverture à l'urbanisation de la zone (dite « 2AU ») à une modification ou à une révision de ce plan, soit fixer immédiatement les règles de constructibilité applicables dans la zone en subordonnant la possibilité d'autoriser des constructions à la réalisation des voies et réseaux nécessaires à la périphérie immédiate de la zone.

Appréciation de la destination d’une usine de méthanisation : il faut tenir compte du PLU et du CRPM. CE 17 janv. 2024, n°467572. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Recours contre un permis de construire une usine de méthanisation et ordonnance de référé suspendant l’exécution de ce permis. Le recours reproche au permis de construire la méconnaissance des règles de recul prévues par le PLU. L’article du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) visé prévoit des règles de recul ne s'appliquant pas aux bâtiments d'exploitation agricole.

Le lexique du règlement du PLU définit l'exploitation agricole comme la sous-destination des constructions destinées à l'exercice d'une activité agricole, laquelle est elle-même reprise par les termes de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime (CRPM).

Afin de déterminer si le permis de construire d'une unité de méthanisation pouvait bénéficier de l'exception aux règles de recul prévue par le règlement du PLU, il convient de rechercher si le projet d'unité de méthanisation en cause pouvait être regardé comme une activité agricole au regard de la définition qu'en donne le lexique du règlement du PLU, éclairée par les articles L. 311-1 et D. 311-18 du CRPM, selon lesquels la méthanisation peut être assimilée à une activité agricole. Le juge a commis une erreur de droit en estimant que ces dispositions du CRPM étaient sans effet sur la légalité du permis.

Protection des milieux montagnards, portée de l’article L. 122-9 du code de l’urbanisme. CE 17 janv. 2023, n°462638. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Si les dispositions de l’article L ; 122-9 du code de l’urbanisme permettent, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir contre les documents et décisions relatifs à l'occupation des sols en zone de montagne, de contester utilement l'atteinte que causerait l'un des projets énumérés à l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme aux milieux montagnards et, par suite, aux habitats naturels qui s'y trouvent situés, il résulte de leurs termes mêmes qu'elles n'ont en revanche pas pour objet de prévenir les risques que le projet serait susceptible de causer à une espèce animale caractéristique de la montagne (les requérants ne pouvaient donc se prévaloir du risque que le projet (éoliennes) faisait courir aux chouettes chevêchettes d'Europe et les chouettes de Tengmalm.

Caractère indivisible (en l’espèce) d'une disposition d'une OAP du PLU. CAA Toulouse, 21 déc. 2023, n° 21TL24729. Le "principe de desserte à respecter" d'une OAP visant à densifier l'urbanisation d'un secteur n'est pas divisible de cette OAP, elle ne peut donc faire l'objet d'une annulation partielle. La révision du PLU d’une commune comprend une orientation d'aménagement et de programmation (OAP) de densification d'un quartier. Cette orientation se matérialisant sous la forme de deux secteurs différents dédiés et identifie à l'intérieur de son périmètre des « parcelles hors OAP ».

Des flèches à double sens de circulation matérialisent les futurs axes de circulation au sein de cette OAP.  Des requérants contestent ces axes de circulation qui traversent des parcelles dont ils sont propriétaires. Ils demandent donc l'annulation du seul « Principe de desserte à respecter » au sein de l'OAP et non de la globalité de l'OAP.

Le juge de la cour administrative d'appel de Toulouse rejette la demande, estimant que ce «principe de desserte à respecter» n'est pas divisible des autres dispositions avec lesquelles il forme un ensemble complet et cohérent.

Une protection végétalisée peut remettre en cause l’intérêt pour agir du voisin immédiat. CE 19 janv. 2024, n°469266, Inédit au recueil Lebon. Recours contre un permis de construire de voisins immédiats d’un projet de construction d’une maison individuelle et d’un garage qu’ils jugeaient de nature à porter atteinte aux conditions de jouissance de leur propriété (vue et tranquillité). Pour fonder leur demande, ils se sont cependant bornés à faire état de leur proximité immédiate avec le projet et de l’existence d’un litige de bornage (pour la détermination d’une servitude de passage) avec leurs voisins. Par ailleurs la commune a soutenu que le projet, objet du permis de construire, n'est pas susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de leur bien compte tenu notamment des protections végétalisées séparant les deux terrains.

Une même formation de jugement peut sursoir à statuer en vue de la régularisation d’une autorisation d’urbanisme et statuer au fond. CE, 17 janv. 2024, n°462638. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Pour le Conseil d’État une même formation de jugement peut à la fois surseoir à statuer par une décision avant dire droit dans l’attente d’une mesure de régularisation en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, et statuer définitivement sur le même litige, aucun texte ni principe général du droit imposant que la formation de jugement soit différente dans ces hypothèses.

Élaboration des PLU : notion de « surfaces affectées à des productions bénéficiant d’une AOP ».  CE 29 janv. 2024, n°470379. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Pour l'application des articles L. 112-1-1 et D. 112-1-23 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), prévoyant les hypothèses dans lesquelles un projet de plan local d'urbanisme (PLU) doit être soumis pour avis conforme à la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), doivent être regardées comme « des surfaces affectées à des productions bénéficiant d'une appellation d'origine protégée (AOP) » les surfaces qui sont recensées comme étant effectivement exploitées à ce titre et non celles qui seraient susceptibles de l'être au regard des prescriptions d'urbanisme applicables.

Notification des recours à l’encontre des autorisations du sol à Paris. CE 30 janv. 2024, n°471649.La notification d’un recours gracieux ou d’un recours contentieux contre un permis de construire délivré par le maire de Paris, au maire de l’arrondissement dans lequel se situe le terrain d’assiette du projet, à l’adresse de la mairie d’arrondissement, doit être regardée comme une notification faite à l’auteur de la décision au sens de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme, alors même que l’affichage de ce permis sur ce terrain ne fait pas mention de cette adresse.

Rejet du pourvoi contre la déclaration d’utilité publique des travaux de réalisation de la ligne ferroviaire. Nouvelle entre Montpellier et Béziers. CE 2 févr. 2024, n°473429 Mentionné aux tables du recueil Lebon. Les requérants avaient mis en cause : l’évaluation économique et sociale du dossier, l’évaluation des incidences du projet sur les zones Natura 2000, l’étude d’impact, la régularité de l’enquête publique et la légalité interne du décret (inconvénients du projet ne présentant pas un caractère excessif).

Cassation d’un arrêt annulant l’autorisation de construire un parc éolien (avis de l’autorité environnementale et évaluation environnementale). CE 5 févr. 2024, n°463620 et 463619. Mentionné aux tables du recueil Lebon.

Projet de parc éolien. Arrêt d’une CAA cassé pour plusieurs erreurs de droit :

-  Sur l’avis de l’autorité environnementale qu’elle a jugé irrégulier au seul motif que la directrice régionale adjointe référente du service développement durable et aménagement de la DREAL Bourgogne Franche Comté faisait partie des agents mis à la disposition de la MRAe sans qu’il soit établi qu’elle avait participé à la préparation de cet avis ;

-   Sur l’évaluation environnementale de la mise en conformité du PLU avec le projet : pour la CAA son absence (après examen cas par cas) constituait un vice ayant privé les requérants d’une garantie et exercé une influence directe sur les règles d’urbanisme applicables au projet. Le projet avait pourtant fait l’objet d’une évaluation environnementale sur le périmètre concerné par le projet, évaluation qui avait été jointe au dossier d’enquête publique.