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Dérogation espèces protégées, aires de stationnement ouvertes au public, remise en état ordonnée pour changement de destination irrégulier...quelques décisions intéressantes du mois de mars le 02/04/2024

Nécessité d’une demande de dérogation espèces protégées : champ d’appréciation du juge. Prise en compte des mesures de réduction proposées. CE, 8 Mars 2024, n° 463249. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Cassation d’un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux annulant partiellement l'arrêté d'autorisation d'exploiter un parc éolien en tant qu'il ne comportait pas la dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées. Le Conseil d'État juge que la Cour a commis une erreur de droit en ne prenant en compte que les mesures d'évitement projetées et non les mesures de réduction proposées pour apprécier la nécessité de la dérogation.

Précisions sur les aires de stationnement ouvertes au public de plus de 50 places soumises à étude d’impact. CE 16 févr.2024, 472788. Le Conseil d’État précise la notion d’« unité de stationnement ouverte au public » au sens de la rubrique 41 du tableau annexé à l’article R. 122-2 du Code de l’environnement fixant les seuils à partir desquels un projet doit faire l’objet d’un examen au cas par cas et savoir si une évaluation environnementale doit être réalisée. En cause une ICPE de collecte de déchets.

Le Tribunal administratif avait estimé que « la notion d’aires de stationnement ouvertes au public ne saurait relever d’une appréciation globale incluant les emplacements réservés à l’administration du seul fait qu’ils relèvent d’une même infrastructure et ont une entrée commune ». Pour le Conseil d’État, au contraire, le nombre d’unité d’une même aire de stationnement doit être apprécié de manière globale dès lors que celle-ci a, au moins en partie, vocation à être ouverte au public. En l’espèce l’aire de stationnement comprenant 55 places de stationnement, le projet devait faire l’objet d’une évaluation environnementale (+ de 50 places).

Procédure d’approbation d’un PLU : attention à la participation des élus susceptibles d’exercer une influence sur le vote. CE 8 mars 2024, n°461520. Demande d’une association visant à annuler la délibération d’un conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune. L'association demandait notamment l'annulation de certains articles réglementaires du plan. Demande rejetée par la Cour administrative de Marseille.  « (En se fondant sur ces motifs) et en s'abstenant, ce faisant, d'apprécier si la participation des membres du conseil municipal mis en cause à des délibérations préparatoires et au vote d'adoption de la délibération avaient, du fait de l'influence exercée par ces derniers, assuré la prise en compte de leurs intérêts personnels, la cour a commis une erreur de droit. »

Changement de destination irrégulier : le juge peut ordonner la remise en état même si l’infraction ne porte que sur l’utilisation du bâtiment. Cass., crim., 6 févr. 2024, n°23-81.748. Publié au bulletin. Un particulier et une société sont reconnus coupables de s’être livrés à une activité de restauration en méconnaissance du PLU, là où celui-ci n’autorisait que les activités aquacoles. Les permis de construire avaient été délivrés sur le fondement d’une activité ostréicole et les travaux réalisés pour créer un service de restauration ont abouti à un changement de destination. Confirmation de l’obligation de remise en état conformément au permis de construire.

« en application des dispositions des articles L. 610-1 et L. 480-5 du code de l'urbanisme, les infractions aux dispositions des plans locaux d'urbanisme peuvent donner lieu à mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la seule circonstance que l'infraction porte sur l'utilisation de bâtiments de manière non conforme à celle autorisée par le PLU ne faisant pas obstacle à ce qu'une telle mesure à caractère réel soit prononcée ».

Appel d’un jugement ayant annulé un permis de construire : office du juge. CE 22 mars 2024, n°463970. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Saisi d'un jugement ayant annulé une décision refusant une autorisation d'urbanisme, il appartient au juge d'appel, pour confirmer cette annulation, de se prononcer sur les différents motifs d'annulation que les premiers juges ont retenus, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui.

En revanche, si le juged'appel estime qu'un des motifs de la décision de refus litigieuse est fondé et que l'administration aurait pris la même décision si elle avait retenu ce seul motif, il peut rejeter la demande d'annulation de cette décision et infirmer en conséquence le jugement attaqué devant lui, sans être tenu de statuer sur la légalité des autres motifs retenus par l'autorité administrative et sur lesquels les premiers juges se sont prononcés.

Rappel du régime d’autorisation applicable aux antennes relais. CE 21 mars 2022, n°490536. Mentionné aux tables du recueil Lebon.

1) a) Est soumise à la procédure de déclaration préalable la construction d'antennes-relais de radiotéléphonie mobile, de leurs systèmes d'accroche, et des locaux ou installations techniques nécessaires à leur fonctionnement lorsque :

- soit, quelle que soit la hauteur de l'antenne, la surface de plancher et l'emprise au sol créées sont supérieures à 5 mètres carrés et inférieure ou égale à 20 mètres carrés,

- soit, s'agissant des antennes d'une hauteur supérieure à douze mètres, la surface de plancher et l'emprise au sol créées sont inférieures ou égales à 5 mètres carrés.

b) Les projets comportant des antennes d'une hauteur inférieure ou égale à 12 mètres et entraînant la création d'une surface de plancher et d'une emprise au sol inférieures ou égales à 5 mètres carrés restent dispensés de toute formalité en application des dispositions de l'article R. 421-2.

2) Pour l'appréciation des seuils applicables à ces projets de constructions, (j et c de l'article R. 421-9 du code de l'urbanisme, a de l'article R. 421-2), seules la surface de plancher et l'emprise au sol des locaux et installations techniques doivent être prises en compte, et non l'emprise au sol des pylônes.

Certificat opérationnel - Le CU ne peut pas se contenter de mentionner un possible sursis à statuer. Encore faut-il que celui-ci soit justifié au regard du contexte de l’opération et de l’état d’avancement du futur PLU.. CAA Lyon, 20 févr. 2024, n° 22LY03400, M. E, C +. Un certificat d'urbanisme mentionnait la possibilité d'opposer un sursis à statuer sans préciser quel zonage ou dispositions du futur plan local d'urbanisme étaient susceptibles de justifier un tel sursis à statuer. L'état d'avancement du futur plan local d'urbanisme permettait pourtant de connaître le zonage, agricole, que ce document projetait de retenir sur le terrain d'assiette du projet, et la demande de certificat d'urbanisme opérationnel était suffisamment précise pour apprécier si la compatibilité avec les règles d'urbanisme pourrait être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme.

La mention de la possibilité de surseoir à statuer, qui est divisible, était, par suite, insuffisamment motivée.

Pas de régularisation possible pour un permis de construire obtenu par fraude. CE 11 mars 2024, n°464257. Mentionné aux tables du recueil Lebon. Le juge ne peut faire application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme lorsque l'autorisation d'urbanisme dont il est saisi a été obtenue par fraude.

Possibilité de régulariser une irrégularité par un PCM même si celui-ci induit un bouleversement de l’économie générale du projet dès lors qu’il ne change pas la nature du projet initial. CE 11 mars 2024, n°463413. Mentionné aux tables du recueil Lebon. La Cour avait jugé que le projet de rénovation d’une maison d’habitation et la création à proximité d'une piscine, d'un vestiaire et d'un débarras ne permettait pas, eu égard à l'activité projetée d'accueil d'enfants à la piscine, de satisfaire aux exigences du nombre de places de stationnement minimal édictées par les règles d'urbanismes applicables.

La possibilité que ce vice soit susceptible de faire l'objet d'une mesure de régularisation en application (L. 600-5-1 du code de l'urbanisme) ou d'une annulation partielle (L. 600-5), avait été écartée au motif que la possibilité de créer des places supplémentaires sur le terrain d'assiette du projet n'apparaissait pas envisageable compte tenu de la taille du terrain et de la nécessité d'y prévoir des espaces plantés pour respecter les exigences d'autres dispositions d'urbanisme.

En fondant son appréciation sur le seul projet existant, sans tenir compte de la possibilité pour le pétitionnaire de faire évoluer celui-ci et d'en revoir, le cas échéant, l'économie générale sans en changer la nature, la cour a commis une erreur de droit.

La régularisation par un permis modificatif est donc possible même si celui-ci a pour objet de bouleverser l’économie générale du projet : un "vice entachant le bien-fondé d'une autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé dans les conditions qu'elles prévoient, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même".

Recours abusif : la demande de condamnation pour recours abusif par le promoteur peut être elle-même abusive. CA Aix-en-Provence, 30 janv. 2024, n°20/00834. Par un arrêt rendu ce 30 janvier 2024, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a rejeté la demande de réparation d'une société estimant que l'auteur d'un recours contre son permis de construire avait abusé de son droit d'ester en justice. La société bénéficiaire du permis de construire annulé a alors été condamnée à réparer le préjudice subi par l'auteur du recours.

Pas d’obligation de classer en EBC pour l’application des règles du PLU de la zone N. CE, 12 mars 2024, n°464589. 10. Ni les circonstances que la parcelle d'assiette du projet, qui est boisée, n'est pas située dans la partie de la zone N que les auteurs du plan local d'urbanisme ont classée en " espaces boisés classés ", et qu'il existe à proximité, sous forme d'habitat diffus, des maisons d'habitation précédemment bâties sur de vastes parcelles, ni le fait que les services de protection et de lutte contre l'incendie n'ont pas émis d'avis défavorable au permis de construire sollicité ne sont de nature à démontrer que le classement de la parcelle C n° 426 en zone N serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme prévoyant le classement de la parcelle C n° 426 doit être écarté.

Préemption : une différence entre le prix exprimé en chiffres et le prix exprimé en lettres est regardée comme une absence de prix rendant la décision illégale. CAA Paris, 29 févr. 2024, n° 22PA03860. En l’espèce la décision mentionnait un prix exprimé en chiffres de « 290 000 euros » et l'autre écrit en toutes lettres de « cent quatre-vingt-dix mille euros ».

L’établissement public territorial préempteur a plaidé l'erreur de plume, couverte selon lui par les dispositions de l'article 1376 du code civil (« l'acte sous signature privée par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible ne fait preuve que s'il comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l'acte sous signature privée vaut preuve pour la somme écrite en toutes lettres »).

La CAA a jugé ces dispositions inapplicables aux décisions de préemption, lesquelles n'ont pas le même objet. Pour la cour, il s'agit d'une incohérence affectant un élément essentiel et la décision doit être regardée comme ne comportant aucun prix et donc prise en méconnaissance des prescriptions de l'article R. 213-8 du code de l'urbanisme.

Construction irrégulière : pas besoin de justifier le montant de l'astreinte assortissant une mesure de restitution. Cass. crim., 6 févr. 2024, n° 22-82.833, F-B. L'astreinte prononcée au titre de l'article L. 480-5 du code de l'urbanisme n'a pas à être motivée au regard des ressources et des charges du prévenu.

Une prévenue, déclarée coupable d'avoir édifié une maison d'habitation sans autorisation et en violation du PLU, se voit condamnée par le tribunal correctionnel à une amende mais aussi à la remise en état des lieux sous une astreinte de 50 euros par jour de retard au titre des articles L. 480-5 et L. 480-7 du code de l'urbanisme. En appel, la démolition de la construction irrégulière dans le délai imparti est confirmée et le montant de l'astreinte est doublé.

A l'appui de son pourvoi, l'intéressée invoquait un défaut de motifs contraire à l'article 593 du code de procédure pénale, l'aggravation du montant de l'astreinte ayant été prononcée sans plus d'explication au regard de la faiblesse de ses revenus. En l'absence de tout texte le prévoyant, une telle mesure n'a pas à être motivée au regard des ressources et des charges du prévenu